22.12.08

Le mythe des modèles mathématiques

C’est curieux, le seul tort que veulent bien reconnaître les banquiers c’est de ne pas avoir compris les applications mathématiques sophistiquées qu’ils croyaient indispensables au développement de leurs activités et de leurs profits. Comme la plupart des gens n’ont qu’une sympathie très limitée pour les mathématiques, ils y voient une circonstance atténuant la responsabilité des grands patrons des banques. Malheureusement c’est faux ; il y a certes des applications mathématiques complexes utiles dans certains domaines, comme les options ou les warrants, mais le niveau de mathématiques nécessaire pour établir l’échéancier d’un crédit immobilier, serait-il à des conditions insensées comme les « subprimes option ARM », ne dépasse pas le niveau de la classe de première.
Or, l’étape actuelle de la crise financière est principalement causée par les prêts immobiliers, et les mathématiques n’y sont pour rien. En effet, on s’aperçoit progressivement que, pour faire apparaître de très juteux profits sur des prêts consentis à des foyers aux ressources insuffisantes pour faire face aux remboursements, il doit y avoir un truc. Le truc c’est d’utiliser un artifice comptable qui n’a pas été conçu pour un usage manifestement abusif : la comptabilisation, le jour de la signature du contrat, de la totalité du profit attendu sur toute la durée du contrat, souvent trente ans.
Alors, on peut supposer que certains de ces responsables de grandes banques sont d’un niveau de nullité qui leur permettait de ne pas découvrir cela, mais constatant que le Directeur de la Banque de France non seulement le sait, mais s’en inquiète[1], on est forcé de se demander si ce mythe des modèles mathématiques, dissimulation aux effets peu durables, ne révèle pas de profondes inquiétudes.

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[1] http://www.banque-france.fr/fr/instit/telechar/discours/2008/disc20081211.pdf

1 commentaire:

Jonathan Livingston a dit…

J'ai lu quelques-uns de vos billets... Je vous trouve bien optimiste face aux outils de la finance. D'un point de vue de citoyen qui n'a aucun cent à investir, qui a même été un de ces mauvais actifs ou douteux qu'on pouvait créer d'un simple clic (ce qui me faisait penser depuis longtemps que le niveau de vie en amérique était compensé par un allongement du crédit à la consommation (pacte entre les banques et l'état)), et qui regarde les sommes colossales des gouvernements colmater la débâcle financière, et qui s'attend à une crise économique d'envergure, il y a de quoi se poser des questions. En cherchant à comprendre, voici ce que j'ai découvert.

Les états ont permis aux banques de transférer les risques de leurs créances grâce à l'ingénérie financière (la titrisation) à des investisseurs trouvés par un tiers. Dans l'opération, elles retrouvent des fonds propres et peuvent augmenter encore leurs crédits... Le financement, dès lors, coule à flot. Enfin, se sont multipliées les sociétés de gestion et de financement opérant avec les principes de la titrisation des crédits... En fait, de nombreux investisseurs et opérateurs vivent du flux des crédits. C'est même une industrie, donc il faut toujours plus de créance pour alimenter ceux qui ont de l'argent à faire fructifier.

Bref, la banque devient un service de vente de crédits en se souciant de moins en moins de la qualité du crédit, de ses actifs non liquides dépendant de la bonne conduite ou de la viabilité économique de l'emprunteur. Les agences de notations qui au fait ne font que donner des côtes en fonction du pourcentage de fonds propres supposés derrière les volumes des portefeuilles de crédits ne donnent que des indications accessoires quand la supercherie généralisée est découverte...

Enfin, quand la qualité des titres est cachée dans des paquets composés de titres superposés de différentes valeurs (CDS,CDO), on commence à s'éloigner de la réalité du risque primaire et en fait ce qu'on fait c'est de distribuer les risques à tout le monde dans un réseau tentaculaire infini... Vu que l'épargnant ordinaire n'a pas la moindre idée de la complexité où son argent est placé, de toute façon, le risque de magouille et de dérapage devient incommensurable.

On découvre aujourd'hui, que tous ces produits financiers sophistiqués sont superposés, enchevêtrés à y perdre le fil. Pire que cette société de financement est la norme. Il est aberrant de penser que 300 Ms de mauvais actifs allemands seraient dus à la crise des subprimes américaine. Je pense qu'on trouve tellement de façon de financer n'importe qui et n'importe quoi qu'on a juste perdu le fil de ce délire... Wall Street a le dos large...

Les systèmes bancaires sont coupables d'auto-aveuglement rentable pour ceux qui ont su en profiter...

Quand on pense qu'on a offert des CDS sur d'autres CDS (CDS au carré) et qu'on en était au développement des «au cube». Quand on regarde l'histoire du papier commercial enfin ici au Canada pour ne donner qu'un exemple, on constate que des sociétés ont été incapables de trouver de nouveaux investisseurs pour payer les anciens papiers à terme. Bref, c'est le même système de Ponzi qu'on accuse chez un Madoff qui est à l'oeuvre, mais personne n'en parle... et les gouvernement sans discuter épongent des années de magouille en donnant comme justification à une population qui n'y connait stricto rien que trop d'intérêts importants étaient en jeu, sans autre explication...

Quand on pense que les états ramassent les pots cassés sans revoir la réglementation de cette folie...

Évidemment, tout cela a été utile pour financer des pans entiers de l'économie non viable, maintenir des jobs, etc. Mais il faut tout de même reconnaître que nous avons financé une croissance folle non viable, donc fausse... Et là c'est la correction, retour à la réalité. Et comme toute cette illusion est tissée serrée, on n'a pas fini de voir les fractures...

Je trouve que l'aveuglement et la vitesse ne sont pas nécessairement une stratégie gagnante de développement économique...

Les mathématiques ont juste permis de faire de savants calculs et de cacher le principe de l'ensemble qui est finalement une théorie qui se casse la gueule...

Évidemment, qui est coupable dans cette histoire, tout le monde et personne et c'est ce qui est bien inquiétant...