15.11.08

Qu’entend-on par excès de régulation ?

Des gens habituellement très sérieux sont en train de nous mettre en garde, avec un air de profonde inquiétude, contre un des plus graves dangers qui nous guette : la réforme actuelle du capitalisme financier risque de causer un excès de régulation.
Ciel ! Mais qu’est-ce donc un excès de régulation ? Il faut y réfléchir à deux fois avant de comprendre de quoi il peut s’agir. Et c’est lors de la première fois que m’est revenue cette loi pédagogique de la Cosa Nostra : « nos adversaires ne sont pas les juges très honnêtes ou excessivement honnêtes, ce sont les juges honnêtes ». Et lors de ma seconde réflexion, j’ai imaginé ce que pourrait être un excès de régulation dans le code de la route : les associations d’automobilistes affirmeraient qu’elles sont pour le code de la route, mais qu’il ne faudrait pas tracer des lignes excessivement continues.
Évidemment, vous allez dire que la régulation financière ne concerne pas des populations peu soucieuses de légalité comme les maffieux, ou parfois irresponsables comme les fous du volant, mais des business men en costume trois pièces dont les mains ne sont tachées ni par le sang, ni par le cambouis, et que, par conséquent, leurs intentions sont pures. Admettons (dans l’intérêt de la discussion seulement).
Ce qu’on appelle la régulation n’est rien d’autre que la manière de mettre en pratique les lois et règlements régissant une activité. De ce point de vue, un non-financier comprend immédiatement qu’on régule ou qu’on ne régule pas, l’idée de réguler un peu, ou juste quand cela vous arrange ne pouvant sérieusement être considérée quand on parle de régulation ; d’ailleurs, ceux qui on l’expérience de conversations avec la maréchaussée au sujet d’un comportements ne respectant pas la régulation, comprennent dès le premier entretien qu’un vrai régulateur dispose d’une dialectique puissante (on ne peut y répondre) et efficace (on signe le PV).
Mais un financier vit dans un monde différent, sans maréchaussée, ou, ce qui ne vaut pas mieux, doté de régulateurs équipés d’une dialectique misérable comparée à l’autre. Et sa vision d’une régulation pas excessive, signifie que non seulement elle ne doit rien lui coûter, mais qu’elle ne doit surtout pas l’empêcher de poursuit des affaires fructueuses même quand elles franchissent légèrement la ligne, comme de prêter, à un Mexicain ramasseur de fraises et ne parlant pas un mot d’anglais, avec un revenu annuel de 14000$, la totalité du financement d’une maison de 720 000$, à Bakersfield en Californie*.


* Cité par Michael Lewis le 11/11/2008 dans The End of Wall’s Street Boom

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