10.1.06

Faire le bonheur des fonctionnaires

Les fonctionnaires ont des soucis ; non pas en raison du grand nombre d’entre eux qui va partir prochainement en retraite, mais parce que leurs ennemis, qui non seulement n’ont pas pu réduire leur nombre mais se sont montrés incapables d’empêcher leur foule d’augmenter, font campagne pour au moins interdire leur remplacement.

Or, imaginez un peu la tristesse qui s’abat sur la vie d’un fonctionnaire lorsque son voisin de bureau part en retraite ; on a beau être content pour son collègue qui voit se réaliser l’idéal pour lequel il s’était engagé en entrant dans le service public (à ne pas confondre avec le service du public, concept distinct et sans aucun intérêt), il ressent à plein l’ennui de sa condition qu’il ne peut plus désormais partager. Dans le pire des cas, le chef de service peut même lui demander de traiter un dossier qui était auparavant à la charge de son collègue, ce qui constitue évidemment un abus de droit qu’il faudra d’urgence soumettre au syndicat qui pourra peut-être en faire un motif de grève. Mais le plus souvent, ces extrémités sont épargnées, car il y avait un bon moment que le cher collègue n’en fichait plus une rame. Ce sont donc des raisons morales, pour ne pas dire sentimentales, qui rendent nécessaire le remplacement des départs en retraite.

A cela les ennemis sans scrupules, ne respectant ni la morale ni les sentiments, opposent les nécessités financières qui exigeraient que moins de fonctionnaires se dévouassent sans compter au bien de la nation ; ils veulent bien qu’ils se dévouent, mais en comptant.

Cela aurait pu dégénérer en violent conflit entre les fonctionnaires et leurs ennemis, si le Président de tous les Français n’avait proposé une solution que Saint Louis n’aurait pas désavouée : pour consoler les fonctionnaires qui ne partent pas en retraite de la perte cruelle de leurs amis et collègues de bureau, et pour tenir compte du fait que les souffrances résultant de la perte cruelle en question ne cesseront jamais, il leur sera versé jusqu’à leur retraite à eux une indemnité égale à 50% des sommes économisées par le non remplacement des départs en retraite.

Fort heureusement, le revenu des fonctionnaires en retraite est payé par l’état, comme celui des fonctionnaires en activité ; les départs en retraite ne font donc pas faire une économie qui pourrait être partagée. La seule diminution des charges de l’état vient du décès des retraités ; et comme il y en aura beaucoup moins que de nouveaux retraités, les charges de retraites de l’état vont augmenter. Pour que l’ensemble se stabilise, il faudrait que les recrutements soient équivalents aux décès.

7.1.06

Observations sur la dette de l'Etat

On trouve sur le site de l’Agence France Trésor des informations indispensables à la compréhension des problèmes posés par la dette de l’Etat, et à une écoute critique les commentaires qu’elle a attirés récemment.

Par exemple un « expert » désireux de rassurer le public sur les conséquences de la création de la dette sur les générations à venir, affirmait que ces générations ne souffriraient pas d’avoir à la rembourser car elles auraient hérité des titres émis en contrepartie. Cela serait vrai si ceux qui rembourseront la dette (collectivement) étaient aussi ceux qui détiendront les titres (collectivement). Or, selon l’Agence France Trésor, 55% des obligations émises par l’Etat sont détenues par des non-résidents ; cela a deux conséquences et pose deux questions.

La première conséquence est évidemment que les générations futures auront à rembourser les obligations d’Etat détenues par les non-résidents ; il ne peut donc être nié que l’attitude irresponsable de la génération au pouvoir depuis 25 ans (de gauche ET de droite) aura effectivement pour résultat d’obliger ses enfants à rembourser les emprunts qu’elle a faits à l’étranger.

La seconde conséquence concerne tous les Français, présents et futurs ; le fait que 55% de la dette soit détenue par des non-résidents signifie qu’ils encaissent 55% des intérêts. Cela est d’une extrême gravité. En effet, si 100% de la dette était entre des mains françaises, les intérêts leur reviendraient en totalité, et on pourrait dire que finalement « ça ne sort pas de la famille ». Mais les intérêts annuels versés aux non-résidents représentent 23 milliards d’euros qui sont, et seront, prélevés sur les revenus des Français ; cette somme est considérable ; elle représente par exemple 15000€ pour 1500000 personnes, ou 1293€ pour chacun des 17790012 foyers fiscaux imposables. Cela aussi « sort de la famille », et tous les ans. Incidemment, il faut noter que la part détenue par les non résidents serait passée, entre octobre 2004 et octobre 2005, de 52 à 55%. Ce pourcentage concernant la totalité de la dette, cela voudrait dire que les emprunts émis durant cette période auraient été souscrit à 80% par des non résidents.

La première question, posée par l’évidente appétence des non-résidents pour les emprunts d’état français (mais cela doit se vérifier également pour les emprunts d’état de toutes les grandes nations), est la suivante : qui sont ces non-résidents ? Et plus précisément, quelles sont les mesures permettant de s’assurer que les emprunts d’état ne constituent pas le placement idéal de l’argent sale ?

La seconde question porte sur l’influence qu’a pu avoir l’évolution des taux d’intérêts à la baisse sur la tentation à laquelle les gouvernements n’ont pas résisté de voir l’emprunt comme un moyen peu coûteux de résoudre tous les problèmes (et de distribuer tous les plaisirs), et corrélativement si la détestation manifestée par les politiques pour toute augmentation des taux de la banque centrale ne trouve pas son origine dans la facilité résultant de bas taux d’intérêt.

6.1.06

Faire le bonheur du peuple

On peut, par exemple, essayer de limiter l’augmentation des loyers. C’est un sujet éternel ; si on se limite à la période suivant la deuxième guerre mondiale, cela a commencé par une formule terrible : la surface corrigée. Derrière ce nom bizarre, il y avait une méthode très efficace dans deux domaines ; faire le bonheur du peuple d’abord qui voyait son loyer stagner dans une période de forte inflation, et aussi réduire tellement le revenu des propriétaires qu’ils ont cessé d’entretenir les immeubles et de s’intéresser au logement ancien. La situation du logement devenant désastreuse, on a mis en place un nouveau système pour les logements neufs. Les propriétaires furent autorisés à augmenter les loyers sans que cette augmentation dépasse l’indice du coût de la construction, ce qui résulta évidemment en une indexation des loyers qui furent ainsi systématiquement augmentés. Cela donna satisfaction aux locataires et aux propriétaires, car les premiers appréciaient de voir l’indice de la construction évoluer moins vite que leur revenu en raison des forts gains de productivité de cette industrie, et les seconds se disaient que ces augmentations garanties, après tout, ce n’était pas si mal.

Malheureusement arriva une époque où l’indice de la construction, après quelques années d’évolution très modérée connut quelques années de rattrapage. Rapidement quelques bons esprit désireux de restaurer le bonheur du peuple à un niveau où leur nom pourrait être attaché, commencèrent à évoquer l’urgente nécessité de remplacer l’indexation sur l’indice de la construction, manifestement perverse, par une indexation plus équitable sur une autre indice à créer. Ce qui fut dit fut fait, et le nouvel indice est un cocktail comprenant trois parts de l’indice des prix à la consommation, une part de l’indice des coûts des travaux d’entretien et d’amélioration, et une part de l’indice du coût de la construction.

La première application de cette intéressante innovation est la suivante : pour le 2ème trimestre 2005 la variation annuelle s’élève à 2.64%. Pour la même période, la variation de l’indice du coût de la construction est de 0.71%. Voilà donc un nouvel instrument d’amélioration du bonheur du peuple qui permet d’augmenter ses loyers plus que l’ancien. Comme dirait l’autre : C’est l’intention qui compte !