Au moment où il y a lieu de s’inquiéter de l’évidente intention de la finance US de faire payer les dégâts de la crise aux contribuables pour reprendre ensuite le chemin qui lui a été si profitable (au moins pendant un temps), et de la non moins évidente difficulté de l’Administration Obama à imposer ses vues, il n’est pas inutile de s’interroger sur les causes qui ont permis la monstrueuse croissance des banques d'affaires. C’est l’exercice auquel se livre The New Yorker dans son numéro du 4 mai 2009[1].
Après avoir rappelé que la principale fonction des banques d’affaires est de répondre aux besoins des entreprises en capitaux, y sont décrites les trois périodes au cours desquelles l’économie connût des transformations majeures, générant des besoins en capitaux nouveaux, la croissance de ces besoins causant la croissance des banques d’affaires. Ces trois périodes sont :
- la seconde révolution industrielle de la fin du 19ème siècle ;
- les années vingt au cours desquelles l’électrification transforma l’industrie ;
- l’arrivée des technologies de l’information dans les années quatre vingt.
Cela conduit à la constatation que jusqu’en 1996 la croissance des banques d’affaires a suivi les besoins de l’économie. C’est ensuite que les choses se gâtèrent, car tout ce que l’on a obtenu en échange fut des hectares de maisons vides.
D’où une conclusion, sévère mais juste, sur ce qu’il faut impérativement faire :
Outre la réduction immédiate de la taille des banques d’affaires, nous avons la tâche plus difficile de rendre les bulles de crédit, identiques à celle que nous venons de vivre, moins probables. Cela va exiger la limitation du recours excessif à l’effet de levier, qui augmente évidemment le risque sans valeur ajoutée économique. De nombreuses innovations financières semblent aussi surévaluées car il n’est pas clair qu’elles contribuent à l’accomplissement de la mission principale qui est de conduire le capital aux entreprises. Mais il est sans doute plus difficile de légiférer sur le changement le plus important : Wall Street doit reconnaître que sa fonction, telle qu’elle a été dans le passé, est de suivre l’économie réelle, et non de la diriger. Durant la bulle immobilière, le secteur financier a essentiellement cherché à créer la réalité. Maintenant, le temps est venu de se contenter d’y répondre.
On voit, car ce n’est pas le seul exemple d’analyse américaine de la crise très proche des points de vue européens, que l’Europe aurait grand tort de réduire ses exigences sur la réforme de la finance mondiale ; il existe une vaste opposition à l’idée que Wall Street puisse repartir « comme avant ». Cependant, cette finance, qui reste arrogante alors que son proche avenir est très incertain, peut encore perturber l’économie, et il est permis de se demander si cette menace n’explique pas l’attitude parfois surprenante de l’Administration Obama.
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[1] Monsters Inc. By James Surowiecki
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